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Patric Lavaud : Lo Medòc de boca a aurelha
5 mars 2012

SUD-OUEST Lesparre-Médoc lundi 27 février 2012 Un

SUD-OUEST Lesparre-Médoc lundi 27 février 2012

Un ouvrage pour que vive l'occitan en « Medòc »
Par Marie Le Guillou

Patrick Lavaud, organisateur des Nuits atypiques de Langon, vient de publier un livre bilingue sur la langue occitane en Médoc. Un ouvrage audio pour « incarner l'histoire ».

                       

 

 Assis chez eux, le micro tendu, il a passé des heures à converser et écouter les « anciens » livrer, dans la langue occitane, leurs précieux souvenirs médocains. Pour incarner enfin cette mémoire de traditions, d'histoire, de vie, Patrick Lavaud a créé un livre qui parle. Accompagné de trois CD, l'ouvrage publié par les archives départementales offre un témoignage unique de cette vie du début du siècle dans le Médoc.

Ethnologue de formation, le jeune homme qu'il était dans les années 70 entend toujours parler ses grands-parents et parents en occitan, « mais jamais à moi ». Depuis, cette langue que certains croient morte n'a plus de secret pour lui. « J'étais surveillant à Castelnau, j'ai commencé à demander aux enfants si on parlait occitan dans leur famille… De fil en aiguille, j'ai récolté près de vingt-cinq heures de son. »

Ethnologie d'urgence

Du travail à la fête, des comptines aux berceuses, c'est toute une poésie qui se déroule dans les quelque 200 pages et les trois heures de son de l'ouvrage. « Je savais que je faisais de l'ethnologie de l'urgence. L'occitan du Médoc est une langue particulièrement malmenée. » Les habitants ont à l'époque beaucoup de liens avec l'autre côté de l'estuaire et Bordeaux et ont très vite rencontré la langue d'oïl. « Le Médoc s'est desoccitanisé par rapport à Bazas, par exemple, où on entend encore parler occitan sur le marché. » En parcourant des yeux et des oreilles le Médoc du début du XXe siècle, on découvre le vin de Listrac, les huîtres du Verdon, la foire de Sainte-Hélène ou la fontaine de Bernos.

La petite histoire, celle que les manuels scolaires ne nous enseignent pas, est ici livrée par celle et ceux qui auraient pu être nos grands-parents voire nos arrière-grands-parents. « Qui aujourd'hui, dans le Médoc, connaît les gabares de l'estuaire qui assuraient les échanges de marchandises avec Bordeaux, ou le gemmage des pins ? »

Outil pédagogique

À écouter parler cette grand-mère à la voix hésitante, on en a une image si précise qu'elle finit par nous paraître familière. « Si on laisse aux "héros" le soin de nous raconter leur histoire, alors la langue devient charnelle, habitée. Elle cesse d'appartenir au passé. »

Car l'objectif est bien là : donner un outil pédagogique à ceux qui tentent de réanimer cette langue, de lui faire une place dans son berceau. « Il faut redonner la fierté de la langue. Si elle n'est plus parlée, c'est aussi que ceux qui la parlent ont besoin d'un endroit où se retrouver. Il y aura forcément des curieux qui, comme en arrivant dans un pays étranger, auront envie de comprendre l'origine d'une expression ou du nom de ce lieu. »

Histoire d'une terre

La toponymie peut être une porte vers la langue des anciens. Savoir que le lieu-dit où l'on vit signifie « chante coucou » (« cante cocut ») pousserait n'importe quel curieux à ouvrir un peu plus grand ses oreilles… Un savoir utile pour connaître l'histoire d'une terre, la manière dont elle a été exploitée. « On peut se servir du parlé pour nourrir le tourisme. La création du parc naturel doit être associée à cette unité de culture. »

Après sa longue période de collectage, l'auteur a confié aux soins des archives départementales de conserver ces trésors dans un fond qui porte d'ailleurs son nom. Mais récemment, il a réalisé que seule une dizaine de scientifiques qui s'intéressaient au sujet le consultaient. Ce livre veut être dans toutes les mains, qu'elles soient rugueuses, ridées ou encore un peu trop frêles pour le tenir, ses chants et histoires caressent toutes les oreilles.

Promouvoir l'histoire et la langue comme des entités étroitement liées voire inséparables pourrait faire émerger de nouveaux récits. L'auteur, jamais réticent à chanter ou conter, attend avec impatience les rencontres avec des élèves ou membres d'association. Et parce que la mémoire a toujours besoin d'être stimulée pour faire émerger ses secrets, « j'aurais toujours mon enregistreur avec moi au cas où… ».

« Lo Medòc de boca a aurelha » (Le Médoc de bouche à oreille). 20 euros. Dans toutes les bonnes librairies.

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